Les villes de solitude
Dans les villes de grande solitude,
Moi, le passant bien protégé
Par deux mille ans de cervitude
Et quelques clous sur la chaussée,
Dans les villes de grande solitude,
De nouvel an en nouveaux nés,
Quand j'ai bu plus que d'habitude,
Me vient la faim d'un carnassier,
L'envie d'éclater une banque,
De me crucifier le caissier,
D'emporter tout l'or qui me manque
Et de disparaître en fumée
Mais dans les villes de grande solitude,
Tous les héros se sont pollués
Aux cheminées du crépuscule
Et leurs torrents se sont calmés.
Alors je fonce comme une bête
Sur le premier sens interdit.
Aucun feu rouge ne m'arrête.
Je me sens bien dans ma folie.
J'ai envie de violer des femmes,
De les forcer à m'admirer,
Envie de boire toutes leurs larmes
Et de disparaître en fumée
Mais dans les villes de grande solitude,
Quand l'alcool s'est évaporé,
Je replonge dans la multitude
Qui défile au pas cadencé.
J'ai peur d'avoir brisé des vitres,
D'avoir réveillé les voisins
Mais je suis rassuré très vite :
C'est vrai que je ne casse rien.