La Julie jolie
À la luée de la Saint-Jean,
Un fermier qui se raclait des rentes
Dans le champ de misère des pauvres gens
Alla s'enquérir d'une servante.
Après avoir hoché longtemps
Pour quatre paires de sabiots par an
Avec la croûte, et puis le logement,
Il fit embauche de la Julie,
La Julie, qu'était si jolie...
Il l'employa sans un brin de repos,
Du fin matin à la nuit grande,
À mener pâturer les bestiaux
Dans l'herbe déleudée de la lande,
Mais un soir qu'il était tout joyeux
D'avoir liché queuques coups d'vin,
Il se sentit devenir amoureux
Et sauta dans le lit de la Julie,
La Julie, qu'était si jolie...
Depuis c'jour-là, devenu fou d'amour,
Il t'y paya des amusettes,
Des affutiaux qu'l'orfèv' du bourg
Vous compte toujours des yeux d'la tête
Puis vendit brêmailles et genêts,
Vendit sa lande et son troupet
A seule fin de s'faire des jaunets
Pour mettre dans le bas blanc de la Julie,
La Julie, qu'était si jolie...
Si bien qu'un coup qu'il eut plus rien,
Il eut vendu jusqu'à sa ferme,
A'l'mit dehors au vent du chemin
Comme un gars qui pai' plus son terme,
Mais ce jour-là, c'était la Saint-Jean.
Pour quatre paires de sabiots par an
Avec la croûte et puis le logement,
Il s'embaucha chez la Julie,
La Julie, qu'était si jolie...