Les fontaines du jazz
Toutes les filles du quartier
Apprenaient à compter
Sur les touches d'un piano d'occase
Celles qui comptaient gagner
Trois sous de liberté
C'était déjà râpé à la base
Dans les bars de la pègre
Les belles chanteuses nègres
Faisaient mousser pour deux ou trois nazes
Les brumes rouges ébène
Qui roulaient dans leurs veines
Et qui viennent des fontaines du jazz
Demandez à Billy,
À Chet ou à Louis
Comment ça fait quand la vie vous écrase
Tu joues et tu dégages
Et tu piges au passage
L'amour, c'est pas là qu'on le croise
Il attend quelque part
En fuseau léopard
Presque nu sous les becs de gaz
C'est dans les bras d'une trainée
Même pas remaquillée
Que sont nées les fontaines du jazz
Beaucoup plus haut que la musique
Plus bas que le dernier bémol
Ça fait des loosers magnifiques
Des vainqueurs fauchés en plein vol
Des génies que personne n'explique
Endormis à même le sol
Les péchés ont pris tout leur fric
Et les flics tout c’qu’il restait d'alcool
Quand j'veux de la vraie vie
De la belle mélancolie
Je pense pas aux lagunes turquoise
Je parle à Wes, à Oscar,
À Ella dans ses foulards
Et je pars boire aux fontaines du jazz